Bien construire son dossier CNC : les conseils du producteur Arnaud Hiltzer

Bien construire son dossier CNC : les conseils du producteur Arnaud Hiltzer

Arnaud Hiltzer a fondé la société de production indépendante Hello Emotion en 2015, après avoir collaboré pendant quatre ans avec le photographe et réalisateur Yann Arthus-Bertrand au sein de la Fondation GoodPlanet.

Basé entre Paris et Chamonix, il produit principalement des films “Brand Content” pour des marques et des institutions ainsi que des documentaires d’aventures pour la télévision, comme Surf the Line (avec le collectif des Flying Frenchies) ou dernièrement La Haute Route au fil des Glaciers réalisé par Christophe Raylat.

En 2020, le FODACIM a soutenu son film Vers les monts célestes avec Cédric Gras, réalisé par Aurélie Miquel (52’), film qui a également reçu le Grand Prix du FODACIM 2021.

Arnaud a demandé l’aide sélective à la production documentaire du CNC à trois reprises et l’a obtenu deux fois. Il commence donc à bien connaître les rouages de l’institution et les pièges à éviter. Il a accepté de nous livrer quelques explications et conseils au sujet de cette aide sélective à la production (à ne pas confondre avec l’aide automatique dont bénéficient certains producteurs).

FODACIM : Tout d’abord, pourquoi est-ce que cela semble si compliqué de monter un dossier pour le CNC ?

A.H : Le CNC soutient une très grande part de l’économie de l’audiovisuel en France. Comme il s’agit d’argent public, il est normal que les aides reposent sur un système bien encadré, qui peut paraître complexe au début.
C’est le rôle du producteur de gérer le dépôt d’un dossier auprès du CNC, et le réalisateur participe à l’élaboration du dossier sur la partie artistique. Faire un film est de toute façon une aventure en soi, avec ses réussites et ses difficultés. C’est pour cela que le réalisateur et le producteur doivent bien s’entendre et travailler en transparence dès le départ.

FODACIM : Comment cela fonctionne si le projet de film est porté par un auteur-réalisateur-caméraman – comme c’est souvent le cas dans le milieu du cinéma de montagne ?

A.H : C’est très fréquent, dans ce cas le réalisateur aura à la fois un contrat d’auteur et un contrat de technicien. Il aura donc une partie de sa rémunération en droits d’auteurs et l’autre partie en salaire.

FODACIM : Quelles sont les grandes étapes à suivre pour demander l’aide du CNC ?

A.H : La première étape est de construire un dossier, avec les nombreuses pièces requises : dossier artistique, budget, plan de financement, rétro-planning, note d’intention, note de production, synopsis, scénario, résumé, etc.

FODACIM : Petite parenthèse, on a parfois du mal à percevoir la différence entre synopsis et scénario…

A.H : Le synopsis est un mélange entre le résumé et le pitch du film, il va à l’essentiel. Tandis que le scénario détaille tout ce que le spectateur va voir dans le film de manière chronologique. En documentaire, il est parfois difficile d’écrire un scénario détaillé puisque l’on filme le réel et on ne sait pas à l’avance ce qu’il va se passer. Dans ce cas on va écrire ce que l’on cherche à montrer à travers son dispositif.

FODACIM : Que se passe-t-il une fois le dossier constitué ?

A.H : Le producteur cherche un diffuseur – en général une chaîne de télévision – qui rédigera une lettre d’engagement pour diffuser le film. C’est un document indispensable pour déposer un dossier auprès du CNC.

FODACIM : On envoie ensuite son dossier au CNC ?

A.H : Oui, et il faut savoir que chaque société de production a un chargé de compte au sein du CNC. C’est une personne avec qui on peut échanger si besoin. Je conseille d’ailleurs de ne pas déposer son dossier au dernier moment, mais au moins une semaine avant la date limite de dépôt pour avoir le temps de compléter son dossier en cas de pièce manquante par exemple. Les commissions se réunissent environ une fois par mois et les dates de dépôt se font en général deux mois avant. 

Bon à savoir, il existe une bibliothèque de dossiers “modèles” sur le site du CNC : .

FODACIM : Tu as porté plusieurs projets qui ont été sélectionnés par le CNC, mais tu as aussi essuyé un refus, sais-tu pourquoi ?

A.H : Oui, c’est d’ailleurs sur le film Vers les Monts Célestes avec Cédric Gras soutenu par le FODACIM ! Le scénario tel qu’il était rédigé n’a pas convaincu la commission, probablement parce que le dispositif proposé était trop original pour de la télévision.

FODACIM : Selon toi, quels types de films de montagne peuvent intéresser le CNC dans le cadre de cette aide sélective ?

A.H : Soit le sujet est incroyable, comme un événement ou une histoire qui doit vraiment être montré à la télévision, et le dossier peut facilement passer. Soit on est davantage sur un film d’auteur et dans ce cas il faut vraiment convaincre à l’écriture. Il faut garder en tête la notion de “mise en image du réel” ! Il y a tout de même un peu de concurrence alors bonne chance à toutes et à tous !

 

La réalisation d’un film de montagne : à quelles aides et bourses prétendre ?

La réalisation d’un film de montagne : à quelles aides et bourses prétendre ?

Le FODACIM vous liste dans cet article des aides, bourses et formations ainsi que des sites ressources sur lesquels vous pourrez également trouver d’autres informations et aides. Nous vous invitons à vous renseigner sur les conditions d’accès aux aides car un certain nombre d’entre elles sont accessibles uniquement via une société de production. 

1. Les aides financières et les bourses

Dans la construction d’un budget, différents types de financements peuvent entrer en compte. La plupart d’entre eux font l’objet d’une attribution sur dossier. Il est nécessaire pour les demandeurs d’avoir un dossier attirant et qui répond aux critères de l’aide en question (souvent, la présence d’un producteur sur le projet est nécessaire).

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1.1. Les organismes publics
  • Commission Télévision de la PROCIREP (Société des producteurs de cinéma et de télévision) : aides à la production et aides au développement.
    A destination des producteurs
1.2. Les collectivités territoriales
  • Produire un court-métrage en Auvergne-Rhône Alpes.
    A destination des sociétés de production, pour les projets de – de 60min, non destinés à la télévision.
  • Parcs naturels régionaux/nationaux, Villes, communautés de communes : certains films fortement rattachés à un territoire peuvent bénéficier d’aides des différentes collectivités. Pour cela, il est nécessaire d’avoir un dossier de présentation du projet solide et attractif. 
1.3. Les associations et fondations :
  •  Le FODACIM : à destination des réalisateurs, producteurs, auteurs…
  •   Bourse Auteur de documentaire de la Fondation Jean-Luc Lagardère
    A destination des jeunes auteurs (- de 30 ans)
  • Le portail des aides à la création de Vidéadoc 
  • Les fondations : il existe une multitude de fondations qui peuvent soutenir vos projets de films mais aussi participer au financement de votre aventure, projet humanitaire…Retrouvez une liste non exhaustive des fondations ici .
  • La bourse des possibles François Bel de la Fabrique de l’aventure : trois lauréats pour des projets en lien avec la Nature et l’Aventure.

2. Des sites ressources pour les réalisateurs : 

 

Cet article n’est pas exhaustif et est amené à évoluer. Si vous êtes réalisateur, producteur, auteur et que vous avez des suggestions à nous apporter sur d’autres sources de financement, contactez-nous à contact@fodacim.fr

Appel à projets – Montagnes & Environnement

Appel à projets – Montagnes & Environnement

Appel à projets de films pour le “Prix Ushuaïa TV Montagnes & Environnement” en partenariat avec le Chamonix Film Festival et le Fodacim.

 

Règlement

Le Chamonix Film Festival, le FODACIM et Ushuaïa TV lancent un appel à projets pour la 1ère édition du Prix du Film Ushuaïa TV Montagnes & Environnement. Une opportunité pour les réalisateurs de proposer un projet de film de 52 minutes illustrant les thématiques de la chaîne telles que la biodiversité, l’environnement ou la protection des espèces dans l’espace montagnard.

Le réalisateur pourra s’associer au producteur de son choix.

Le projet lauréat obtiendra :

  • Une coproduction d’Ushuaïa TV d’une valeur de 15 000 euros à conclure avec le producteur du film ;
  • Une aide du FODACIM de 2 500 euros ;
  • la projection du film en avant-première au Chamonix Film Festival en juin 2024 ;
  • La diffusion du film sur l’antenne d’Ushuaïa TV comme premier diffuseur.
 

Le calendrier

  • Réception des projets jusqu’au mercredi 15 mars 2023.
  • Pitch par le réalisateur des 3 meilleurs projets sélectionnés auprès de l’équipe éditoriale d’Ushuaïa TV.
  • Remise du « Prix du Film Ushuaïa TV Environnement et Montagnes» dans le cadre du Chamonix Film Festival en juin 2023.
  • Diffusion en avant-première du film au Chamonix Film Festival en juin 2024.

Le règlement

Le réalisateur pourra s’associer au producteur de son choix.
Les dossiers des projets devront être communiqués en français :

  • soit par courrier à l’adresse suivante :

Appel à projets  du Prix du Film Ushuaïa TV Environnement et Montagnes
Ushuaïa TV – Géraldine Chabot
1 quai Point du jour
92100 Boulogne

  • soit par mail au format pdf à l’adresse email suivante : gchabot@tf1.fr

Ils devront comprendre :

  • un synopsis développé,
  • une note d’intention et de réalisation,
  • une filmographie du réalisateur et du producteur,
  • une fiche technique indiquant le titre, la durée du projet, la composition de l’équipe artistique, les moyens techniques et les lieux de tournage pressentis,
  • la liste des organismes de recherche sollicités et des intervenants scientifiques envisagés,
  • un budget et un plan de financement.

La sélection

Ushuaïa TV sélectionnera les projets selon les critères suivants :

  • le respect de la ligne éditoriale de la chaine,
  • la pertinence du projet,
  • la faisabilité financière du projet.

“Quartiers d’été” : immersion pastorale

“Quartiers d’été” : immersion pastorale

Entre liberté idéalisée de ces grands espaces et précarité d’un métier qui s’exerce 24h/24, il y a tout un monde qu’Aude Joël nous dévoile dans « Quartiers d’été ». Quatre bergers et bergères, leurs chiens et des centaines de brebis, ce sont les protagonistes de ce documentaire qui nous immerge, le temps d’une estive, dans la vie quotidienne de ces hommes et femmes qui vivent et travaillent en alpage.

« Parole de réal » avec Aude Joël, réalisatrice de Quartiers d’été, un film soutenu par le FODACIM.

Tu n’es ni réalisatrice, ni bergère, d’où vient cette idée de documentaire sur ce métier si particulier ?

J’ai un peu découvert le monde des bergers par hasard parce que j’ai de la famille qui travaille à la montagne. L’idée de faire un film m’est venue pendant une pause professionnelle et ça a vraiment surgi d’une rencontre avec des gens qui m’ont fait découvrir leur métier et leurs modes de vie pendant 3 mois. Ca correspondait à des questions que je me posais à ce moment-là sur la manière de vivre, sur le rapport au monde, sur le rapport à la nature, à la connexion et à la déconnexion.

Tu poses un regard bienveillant et juste sur ce milieu, quelle a été ton intention en faisant ce film ?

Mon idée était d’essayer de retranscrire les émotions, les situations et le quotidien qui est extraordinaire pour la plupart des gens mais qui a aussi une part d’ordinarité. On se lève le matin, on prend son petit déjeuner, on part travailler… J’avais aussi envie de montrer cet esprit contemplatif parce que l’alpage c’est ça parfois : ça s’accélère d’un coup, pendant deux heures on court dans tous les sens. Puis les deux heures qui suivent, les brebis chôment et on trouve un coin à l’ombre pour lire ou faire la sieste.

 

Après un été en alpage, tu as voulu remonter l’été suivant pour faire un film. Comment as-tu préparé et réalisé ce tournage ?

J’ai profité des intersaisons et de l’hiver pour écrire. J’avais des notions de photos et de réalisation mais sous l’angle institutionnel. Ce film, il fallait que je le fasse seule parce que ce n’est pas possible d‘emmener une équipe de tournage. Les personnes que j’ai rencontrées étaient d’accord pour être filmées mais sans avoir toute une équipe autour. Ça se voulait très intimiste et c’est aussi ce dont j’avais envie !
Pour tourner, je montais généralement 4-5 jours sur un alpage et je restais avec un berger. Puis je redescendais 2 jours pour recharger les batteries et dérusher. Et je remontais quelques jours sur l’alpage suivant. J’ai fait ça pendant 3 mois et demi. Au final, c’était une expérience pour moi aussi.

“Mon idée était d’essayer de retranscrire les émotions, les situations et le quotidien qui est extraordinaire pour la plupart des gens mais qui a aussi une part d’ordinarité.”

Aux yeux du spectateur, la caméra est très discrète. Comment arrives-tu à faire oublier ta présence et celle de ta caméra ?

J’ai énormément filmé. Je filmais du matin au soir, ce qui était très épuisant mais qui  permettait peut-être parfois d’occulter la caméra. Je ne disais jamais « action » ou « c’est  bon on a une séquence ». La caméra tournait tout le temps ! Cela permettait de capter des choses que je n’aurais pas pu avoir si je n’avais pas fonctionné comme ça. C’est aussi l’esprit du film, je n’ai pas écrit de synopsis, j’avais envie que ça soit vraiment immersif et au plus proche de ce que je pouvais vivre pendant cette estive là.

Le montage a dû être une véritable épreuve avec tous ces rushs. Quels ont été tes critères pour sélectionner les bonnes images et créer la trame ?

Le montage a été assez difficile, un peu une expérience dans l’expérience. J’ai travaillé avec un monteur, José Ostos, que j’ai rencontré assez tôt dans le projet, avant de commencer à tourner. Il avait l’expérience de ce genre de tournage et en terme de philosophie de film, on était plutôt dans le même registre. Il m’a beaucoup conseillé au moment du tournage puis au montage, on a fait un travail d’identification des séquences. L’idée était assez claire que la trame du film ce n’était pas une histoire en tant que telle mais des séquences assez représentatives des situations et des problématiques que chaque berger peut rencontrer.

Peux-tu décrire ton processus d’écriture ?

J’avais beaucoup écrit sur l’intention et de quelle façon ça me parlait. Mais je n’avais pas
d’histoires et de synopsis écrit. J’avais une bonne image des situations que je pourrais rencontrer parce que j’avais un peu vécu ça l’année précédente. J’ai aussi eu une aide à l’écriture avec l’association Vidéadoc, basée à Paris. Ils proposent une aide à l’écriture du dossier. C’était assez tôt dans le projet, avant d’écrire, avant de tourner puis après avoir tourné. Cela m’a poussé à me poser des questions sur l’écriture du film également, cela m’a fait réfléchir sur la manière de faire.

 Tu as aussi travaillé avec une société de production pour faire une version 52min de ton film.

Pour la version longue, j’ai écrit et tourné le film seule. Tout a été auto financé au départ puis à partir du moment où le FODACIM m’a aidée, il y a d’autres financements qui sont arrivés (parcs nationaux, département).
Le travail avec un producteur ne concerne que la version 52min et la diffusion sur France 3. Je connaissais un producteur dont le frère est berger dans les Pyrénées. Quand il a vu le teaser, il m’a proposé de l’envoyer à plusieurs chaînes et c’est France 3 PACA qui a souhaité le diffuser. Cette version est adaptée de la version longue.

 

Quartiers d’été de Aude Joël, 1h18. Voir la bande-annonce